Cette loi entend donner des marges de manœuvre aux élus locaux. Il s'agit avant tout d'un texte technique qui prévoit de multiples mesures en matière de différenciation, de compétences à la carte, de décentralisation (logement social, routes, RSA...), de déconcentration et de simplification de l'action locale. Publiée le 22 février, la loi 3DS prévoit 9 titres. Parmi eux, l’on note notamment.
- Différenciation territoriale
- Transition écologique
- Urbanisme et le logement
- Santé, la cohésion sociale, l'éducation et la culture
- Des mesures de déconcentration
- Des mesures de simplification de l'action publique
Pour la différenciation[1] :
Elle permet à chaque territoire d’adapter plus librement son organisation et son action à ses particularités. Pour s'adapter aux réalités locales, la loi réaffirme la capacité d'adaptation de l'organisation et de l'action des collectivités locales aux particularités de leur territoire, dans le respect du principe d'égalité.
- Le pouvoir réglementaire des collectivités est ainsi renforcé.
- La participation citoyenne est élargie
Pour la Décentralisation
La loi prévoit la prolongation du dispositif SRU au-delà de 2025. Les grandes agglomérations devront continuer à disposer d'au moins 20 ou 25 % de logements sociaux. Les communes retardataires bénéficieront de plus de temps et les objectifs de logements sociaux pourront être définis localement, à travers un contrat de mixité sociale, signé entre le préfet et le maire. Il s'agit d'inciter les communes à construire des logements sociaux dans des quartiers aisés.
Des autorités organisatrices de l'habitat dans le cadre intercommunal sont prévues. L'expérimentation de l'encadrement des loyers dans certaines zones tendues est prolongée de 3 ans. Les députés ont ouvert aux intercommunalités et villes volontaires la possibilité de candidater jusqu'au 23 novembre 2022.
S’agissant de l'implantation des éoliennes sur les communes, la CMP a trouvé un accord : les maires pourront encadrer l'implantation d'éoliennes sur leur territoire grâce aux plans locaux d'urbanisme (PLU).
La répartition des compétences en matière de transition écologique est la suivante :
- La région est chef de file en matière d’aménagement et de développement durable du territoire, de planification de la transition et de l’efficacité énergétiques, de coordination et d’animation de l’économie circulaire, de complémentarité des modes de transports ;
- Le département s’occupe des actions de transition écologique concernant la santé, l’habitat et la lutte contre la précarité ;
- Le bloc local assure la mobilité, l’aménagement de l’espace, la transition énergétique au plan local, la gestion de l’eau, de l’assainissement des eaux usées, des eaux pluviales urbaines et des déchets.
La mobilité est clarifiée dans ses compétences :
- Les départements et les métropoles pourront se voir transférer les tronçons de routes nationales liés aux réseaux routiers dont ils ont déjà la responsabilité
- La décentralisation aux régions des routes nationales sera expérimentée, dans les régions volontaires
- Les régions auront désormais la possibilité de se voir transférer la propriété des petites lignes ferroviaires et la gestion des gares.
Faire des collectivités de véritables acteurs de la santé.
- 2 des 3 vice-présidents du conseil d’administration (remplaçant le conseil de surveillance) des ARS sont des élus locaux.
- Financements des établissements de santé (privés ou publics)[2] communes, départements, régions
- Permettre aux collectivités de recruter leurs professionnels de santé[3]
Le département devient chef de file pour l’habitat inclusif[4]Il s’agit de répondre de manière plus coordonnée à des attentes nouvelles et importantes de la population, notamment en matière d’habitat inclusif (mode d’habitation groupé, assorti d’un projet de vie sociale, destiné aux personnes âgées et handicapées).
Pour la déconcentration
Globalement, les mesures liées à la Déconcentration confortera les services territoriaux de l’Etat. Il est question de rapprocher l'État du terrain, dans une logique d'appui et de contractualisation avec les collectivités territoriales.
Les préfets se voient conférer une plus forte autorité sur les agences de l'État. Le préfet de département devient le délégué territorial de l'Office français de la biodiversité (OFB). Son rôle est renforcé sur la gouvernance des agences de l'eau.
Le préfet de région devient le délégué territorial de l'Ademe (agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) ce qui permettra de garantir sa bonne articulation avec l'action des autres services de l'État.
Le soutien du CEREMA en matière d’ingénierie technique (bâtiment, mobilités, infrastructures de transport, environnement et risques, mer et littoral)[5]
Pour la décomplexification
La Décomplexification se traduira par des mesures concrètes de simplification de l’action publique locale.
Pour éviter aux usagers de redonner plusieurs fois les mêmes informations à l'Administration, les différentes administrations pourront s'échanger plus facilement les données utiles. (à mettre en lien avec le “dites-le-nous une fois”) Pour cela, une modification du CRPA a lieu par exemple “Les administrations échangent entre elles toutes les informations” (Art. L. 114-8.-I.)
Un amendement prévoit une expérimentation du dispositif « territoires zéro non-recours » dans 10 territoires afin d'améliorer l'accès aux droits, les démarches d'aller-vers et la structuration de réseaux locaux. L’objectif est de lutter contre le non-recours aux droits et prestations sociales.
Ensuite, des mesures liées à la transparence de la vie publique et au lobbying sont prévues. En effet, les obligations déclaratives des élus locaux auprès de la HATVP sont allégées.
Puis, il s’agit de mobiliser les chambres régionales des comptes pour évaluer les politiques publiques “dans son ressort” (Art. L. 211-15 nouveau du CJF). Les auteurs de la saisine sont essentiellement les autorités politiques (président de régions etc.)
V. Conséquences des transferts de compétences
Au profit des départements, certaines autoroutes, routes ou portions de voies non concédées relevant du domaine routier national peuvent être transférées par l'Etat dans le domaine public routier des départements, Il est aussi possible de les mettre à disposition des régions, à titre expérimental. (Art. 38 de la loi)
Quelles sont les conséquences du transfert de compétences ?
Quelle que soit la nature de la compétence transférée obligatoire, facultative ou optionnelle, le transfert produit des conséquences sur les personnels, les biens, les contrats et les tiers.
Le transfert de compétences s'appuie sur plusieurs principes, dont surtout, la substitution de la collectivité attributaire à la collectivité initialement compétente dans tous les droits et obligations liés à l'exercice de la compétence.
Transfert des contrats : Le transfert de compétences, légal ou conventionnel, produit un transfert de la responsabilité de la gestion, autant dans la fourniture de prestations que dans la détermination des orientations. Il s'agit d'un dessaisissement total, par substitution, de la collectivité qui transfère, vers celle qui est destinataire de la compétence (CE, 16 oct. 1970, n° 71536, Cne Saint-Vallier. – Et CAA Bordeaux, 24 juin 2003, n° 99BX00156, Sté SVE onyx).
S’agissant des biens : le transfert d'une compétence entraîne de plein droit la mise à la disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l'exercice de cette compétence. (L1321-1 CGCT). La mise à disposition a lieu obligatoirement à titre gratuit. Elle confère à son bénéficiaire tous les droits attachés au bien à l'exception de celui d'aliéner (Rép. min. n° 756 : JOAN 2 sept. 2002, p. 3000
Transfert de responsabilité : Le transfert de compétence emporte également transfert de responsabilité dans l'hypothèse d'un contentieux. Le juge administratif a précisé que la substitution de la collectivité bénéficiaire du transfert dans l'ensemble des droits et obligations doit être « regardé(e) comme incluant les droits et obligations attachés aux actions pendantes à la date du transfert »[6].Dans un contentieux concernant un transfert entre communes et EPCI, le Conseil d'État a même admis qu'« une communauté urbaine ne peut à compter de la date du transfert des compétences appeler une collectivité ou un établissement public à la garantir des condamnations prononcées avant ou après le transfert »[7]
Transfert de personnels
Article 109 (Modifié par LOI n°2013-403 du 17 mai 2013 - art. 1 (V)) Dans le délai de deux ans à compter de la date de publication des décrets en Conseil d'Etat fixant les transferts définitifs des services, les fonctionnaires de l'Etat exerçant leurs fonctions dans un service ou une partie de service transféré à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales peuvent opter soit pour le statut de fonctionnaire territorial, soit pour le maintien du statut de fonctionnaire de l'Etat.
- Les fonctionnaires de l'Etat ayant opté pour le statut de fonctionnaire territorial sont intégrés dans un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale dans les conditions prévues par les dispositions statutaires applicables à ce cadre d'emplois. Les services effectifs accomplis par les intéressés dans leur corps d'origine sont assimilés à des services accomplis dans ce cadre d'emplois.
- Les fonctionnaires de l'Etat ayant opté pour le maintien de leur statut sont placés en position de détachement auprès de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales dont relève désormais leur service.
-
- Par dérogation à la section 2 du chapitre V de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, ces détachements sont sans limitation de durée. L'autorité territoriale exerce le pouvoir disciplinaire sur les fonctionnaires ainsi détachés. Elle informe l'administration gestionnaire de leur corps d'origine des sanctions prononcées.
- Lorsque les fonctionnaires détachés sont placés, sur leur demande, dans une position statutaire dont le bénéfice est de droit, le détachement est suspendu.
- Les fonctionnaires détachés sans limitation de durée peuvent, à tout moment, demander à être intégrés dans la fonction publique territoriale.
- Les fonctionnaires qui, à l'expiration du délai mentionné au I du présent article, n'ont pas fait usage du droit d'option mentionné à ce paragraphe sont placés en position de détachement sans limitation de durée.
[1] Art. L. 1111-3-1.-Dans le respect du principe d'égalité, les règles relatives à l'attribution et à l'exercice des compétences applicables à une catégorie de collectivités territoriales peuvent être différenciées pour tenir compte des différences objectives de situations dans lesquelles se trouvent les collectivités territoriales relevant de la même catégorie, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit proportionnée et en rapport avec l'objet de la loi qui l'établit. »
[2] Art. L. 1422-3 CSP : Les communes et leurs groupements peuvent concourir volontairement au financement du programme d'investissement des établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif et privés.
« Les opérations financées dans le cadre du programme d'investissement respectent les objectifs du schéma régional ou interrégional de santé.
« Les opérations mentionnées au deuxième alinéa peuvent néanmoins être réalisées en cas de décision des communes concernées ou de leurs groupements de ne pas concourir à leur financement. » ;
[3] Article 127 Le premier alinéa de l'article L. 6323-1-5 du code de la santé publique est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque les centres de santé sont gérés par les collectivités territoriales ou leurs groupements mentionnés à l'article L. 6323-1-3, ces professionnels peuvent être des agents de ces collectivités ou de leurs groupements. Lorsque les centres de santé sont gérés par un organisme à but non lucratif constitué sous la forme d'un groupement d'intérêt public dont au moins deux collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales sont membres, ces professionnels peuvent être des agents de ce groupement d'intérêt public. »
[4] I.-L'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président du conseil départemental est compétent pour coordonner le développement de l'habitat inclusif défini à l'article L. 281-1 du code de l'action sociale et des familles, notamment en présidant la conférence prévue à l'article L. 233-3-1 du même code, et l'adaptation des logements au vieillissement de la population. »
[5] Article 159 de la loi : Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent demander à adhérer au Cérema. « Les demandes d'adhésion sont soumises à l'approbation du conseil d'administration.
«[0.] l'établissement exerce des activités de conseil, d'assistance, d'étude, de contrôle, d'innovation, d'expertise, d'essais, de recherche, de formation et d'intervention. Ces activités sont assurées essentiellement à la demande de l'Etat, des collectivités territoriales ou de leurs groupements adhérents du Cérema.
[6] CE, 23 oct. 2013, n° 351610, Dpt Var
[7] CE, 4 déc. 2013, n° 349614, Communauté urbaine Marseille Provence Métropole.
Comments